La Pensée Joyeuse 2023 - Les Inspirantes
LA PENSÉE JOYEUSE
Retours sur la Pensée Joyeuse 2023
Enracinée dans la réalité de son territoire, la Scène nationale du Mans engage des partenariats qui visent à renforcer la solidarité et à donner à l'art toute sa dimension sociale et politique. C'est pourquoi, Le Temps fort LES INSPIRANTES, UNE TRAVERSÉE FÉMINISTE qui court sur tout le mois de janvier laisse la part belle au monde associatif et engagé.
Ce samedi 14 janvier 2023 aux Quinconces, LA PENSÉE JOYEUSE, une journée d'échanges, de partage et de rencontres, en partenariat avec des associations locales, a accueilli un grand nombre de partenaires sur le thème ÉCRIRE L’INTIME.
◆ COLLAGES FÉMINISTES LE MANS
"Pour la seconde édition du temps fort Les Inspirantes (du 7 au 27 janvier), nous avons été de nouveau invité·e·s par le Théâtre des Quinconces pour coller sur les questions de la dualité, de l’écriture, de l’intime et de la métamorphose. Les auteur…ice·s que nous mettons à l’honneur sur la façade du théâtre relatent dans leurs écrits leur exploration de l’intime quand il s’inscrit dans une démarche d’émancipation et d’affirmation de soi.
Laurène Marx est une autrice trans non-binaire qui raconte sa transition dans son ouvrage "Un temps soit peu / Transe". Dans ce texte bouleversant, nous avons relevé ce passage : « Choisir son nom. Je crois que le jour où j’ai décidé de m’appeler Laurène était le plus beau de ma vie (…) Et c’est le mot que je préfère entendre. » Le choix d’un prénom est une étape importante pour une personne trans (même si ce n’est pas une obligation). C’est se montrer au monde tel que l’on a toujours été au fond, c’est un moyen de se réapproprier son histoire et de renaître.
Axelle Jah Njiké est une autrice, militante féministe, podcastrice et chroniqueuse d’origine camerounaise. Dans son ouvrage "Journal intime d’une féministe (noire)", elle nous livre un récit émancipateur et intimement politique sur sa sexualité. Nous avons collé « Éprouver un plaisir que moi seule sais me donner est une renaissance » car, comme pour Axelle, la masturbation a permis à des femmes d’apprivoiser leur corps qui jusqu’alors était soumis aux injonctions patriarcales.
Selon elle, « la violence est un héritage dont nous devons nous affranchir ». Ayant souffert de violences sexuelles et éducatives dans l'enfance, l’autrice se réapproprie l'histoire des femmes de sa famille et dénonce les injonctions qui ont pesé et pèsent encore sur les femmes. Cette violence, elle la découvre également par sa mère en apprenant son récit de vie : celle-ci qui ne savait ni lire, ni écrire et qui, victime de viol et mariée de force à 12 ans, est devenue mère à 13 ans.
Axelle Jah Njiké fait de l’intime un sujet éminemment politique car s’affranchir d’une « sexualité héréditaire » martyrisée en reprenant le contrôle de son sexe c’est prendre le pouvoir.
Alok Vaid-Menon est un.e activiste et auteur.ice non-binaire qui lutte notamment contre les normes de genre. Dans "Beyond the Gender Binary", iel vulgarise plusieurs théories fondatrices sur les questions de genre. Nous avons traduis un extrait de cet ouvrage : « Comment peut-on exprimer sa douleur quand on ne peut même pas trouver la blessure ? ». L’auteur.ice, qui a été victime de violences en raison de son expression de genre qui n’est pas binaire, écrit ici sur la difficulté de mettre des mots sur ses maux et de réussir à parler lorsque l’on est victime.
En écho aux thématiques mises en lumière dans le cadre des Inspirantes, le Théâtre des Quinconces vous donnait rendez-vous ce samedi 14 janvier pour la "Pensée Joyeuse", une journée d'échanges, de partage et de rencontres avec des associations locales. "
COLLAGES FÉMINISTES LE MANS
◆PLATEAU Radio Alpa
Émission en direct
Le samedi 14 janvier de 14h45 à 15h45, Radio Alpa était en direct de la Scène nationale Les Quinconces et L'Espal pour le temps fort Les Inspirantes.
Pendant une heure, Robin Hulin accompagné de Bertrand et Tiphaine de l’émission Intersection recevaient des artistes et représentants de ce temps fort consacré à la pensée féministe, l’émancipation, les combats pour l’égalité dans la société et le monde qui nous entoure.
Les invitées :
◆Virginie Boccard, directrice de la Scène nationale
◆Alice Sybille
◆Camille Lambert et Pauline George de Solidarité Femmes 72
◆Marlène Boutet directrice du Planning Familial 72
◆Charlotte Lagrange, metteure en scène de "L'araignée"
◆Nathalie Morinière et Elisabeth Marion de l’ACF (association la cause freudienne)
◆PARLER L’INTIME
Espace d’expression animé par le Planning Familial
◆ATELIER GÉOGRAPHIER NOS INTIMES
Écrire sur l’intime, animé par Alice Sibbille
◆ATELIER FANZINE
Animé par le collectif GangReines
Un atelier pour réaliser un fanzine sur place, pour réaliser des cyanotypes avec Emmanuelle Salas et Bee Lumen. Billie R Volva a également fait une lecture de certains de ses poèmes issus de son recueil récemment auto publié "Nu-e-s".
◆ÉCOUTE RADIOPHONIQUE
Podcast réalisé par Suzanne Emery (association Transtopie et collectif GangReines) en collaboration avec les associations partenaires des Inspirantes.
Intimité, Intégrité, Liberté
Un podcast réalisé par Suzanne Emery pour L'association Transtopie dans le cadre de l'évènement La Pensée Joyeuse (Les Inspirantes).
Il a été monté à partir d'entretiens menés auprès de femmes de la Mission Locale du Mans, de l'association Toutes Capables, Solidarité Femmes 72, à l'occasion d'une sortie au Hammam et auprès de professionnels et bénévoles du Planning Familial de la Sarthe et du CDIFF, le Centre d'Information sur les droits des femmes et des familles.
(Certaines interventions ou témoignages peuvent heurter la sensibilité des auditeurices. Assurez-vous d'être dans de bonnes conditions pour les écouter.)
Explorer l'intime c'est un paradoxe : un mouvement vers l'intérieur alors que nous avançons attentif à l'extérieur, un parcours visant à la fois à nous protéger et à nous libérer.
◆RENCONTRE AVEC L’ARTISTE FRANÇOISE PÉTROVITCH ET L’ÉCRIVAINE NANE BEAUREGARD
Figure majeure de la scène artistique contemporaine, Françoise Pétrovitch qui expose ses œuvres aux Quinconces sera présente pour une rencontre inédite avec Nane Beauregard, écrivaine et psychanalyste. Nous les invitons à un dialogue autour de l’écriture et de l’intimité. Entre dessins, peintures, mots et livres, elles nous partageront comment l’écriture est au cœur de leur recherche et de leur travail.
Françoise Pétrovitch par Nane Beauregard
"Quelques notes à propos du dessin, de l’écriture et de l’intime.
Peindre et écrire sont des actes, et ce sont des actes intimes. Sans doute, est-ce d’ailleurs le cas de tous les actes véritables. On est seul face à soi-même, même quand on est plusieurs, je pense par exemple à un metteur en scène de théâtre qui travaille avec des comédiens.
On s’en rend compte dans la vidéo « Ateliers » et je vois bien dans la façon de dessiner de Françoise, d’écrire son dessin, c’est d’ailleurs le mot qu’elle emploie, comment elle sait ce qu’elle veut faire ET comment elle se laisse guider. Comment elle consent à se laisser conduire (et, comme dirait Cl Leguil, consentir n’est pas céder).
Elle est libre de se laisser conduire, elle est même encore plus libre du fait d’accepter que quelque chose en elle sait mieux qu’elle et qu’elle veut se laisser conduire par cette chose mystérieuse, profonde, opaque, cette force, cette énergie, qui lui ouvre le chemin, qui lui fait ce cadeau de lui ouvrir le chemin.
Pas de bruit, pas d’agitation ni musique, dit-elle, il faut que rien ne bouge autour d’elle qui lui fasse quitter sa ligne. Quand je la regarde travailler, je vois qu’elle est comme absente à elle-même et pourtant complètement présente dans son geste, elle est toute entière dans son geste, on peut dire que, à ce moment-là, elle est son geste.
Elle rentre dans la feuille de papier et, pour prendre du recul, elle l’accroche au mur parce que tant que le papier est allongé au sol, elle est aussi, elle se confond même avec le papier qui naît sous elle.
Travail austère pour une œuvre qui semble si légère, si joyeuse et si insouciante mais l’est-elle vraiment ? on connaît la réponse. Un jour je lui ai dit que l’une des vidéos qu’elle me montrait était désespérée. Elle n’a pas répondu mais j’ai senti que son silence valait aveu, c’est ce que je pense en tout cas.
Elle recouvre de différentes couches son dessin, comme pour se rapprocher de là où il faut qu’elle aille, sans savoir où il faut aller mais en sachant quand elle est arrivée là où, avant d’être, elle ne savait pas qu’elle devait aller.
Différentes couches de peinture, de même qu’il y a de la répétition dans mon travail d’écriture et je tiens à ce que cette répétition soit visible comme si le texte se construisait au fur et à mesure qu’il s’écrit, comme si je montrais au lecteur les dessous du décor, l’envers de la scène, les coutures du vêtement.
Une couche ne vient pas en cacher une autre, au contraire, chaque couche se révèle elle-même mais révèle aussi les autres dans une forme de transparence, pour arriver au plus près, au plus précis de ce qui veut se dire à travers moi et qui insiste à se dire et dont je ne suis que la messagère ou, mieux encore, l’outil.
D’où l’importance d’arriver à une forme d’oubli de soi, un oubli très actif, très présent, très particulier que je vois chez Françoise lorsqu’elle travaille. Un oubli de soi qui est le contraire de l’oubli puisqu’il s’agit d’une présence à soi extrêmement aigue. Une présence on ne peut plus présente à soi. Une capacité à s’extraire du monde et de ses objets.
Quand elle peint, elle sait et elle ne sait pas, les deux en même temps. Peut-être même se tient-elle, dans cet équilibre-là entre les deux en même temps.
D’où aussi la nécessité d’aiguiser l’outil, c’est l’outil qui doit être travaillé. Souvenir d’un jeune pianiste qui m’a dit que longtemps, il avait regardé ses mains pour jouer lors d’un concert, que la position de ses mains le guidait sans qu’il ait besoin de lire ou de se souvenir de sa partition et que, le temps venant, ce n’est plus du tout ça qui se passe pour lui. Maintenant il se transporte quelque part, ou, sans doute, nulle part, dans un autre lieu, « un lieu autre », c’est comme ça qu’on pourrait l’appeler, un ailleurs, dans lequel il ne sait pas comment il arrive à aller, à se retrouver, à se rendre, se rendre serait le mot exact, se rendre à lui, avec de nouveau cette idée d’un consentement mais dont il sait maintenant, au bout de plusieurs années de travail acharné, qu’il est au bon endroit.
Je pense que c’est cela l’intime, c’est ce qui définirait le mieux l’intime. Un lieu où on consent à se rendre sans peur et sans reproche et sans aucun effort. L’effort empêcherait, au contraire, d’atteindre ce lieu où on ne peut pas décider, où on ne peut pas prendre de soi-même la décision d’aller. Ce n’est pas un acte de volonté ou d’autre chose d’ailleurs. C’est un lieu en vous, un lieu en soi qui veut bien, ou pas, vous accueillir. C’est soi et ce n’est pas soi non plus et c’est cette part en soi qui décide de votre accueil. Une part qui demande le respect, un immense respect pour vous ouvrir la voie. On pourrait appeler cela la grâce.
FP parle de l’importance du son dans le dessin, du son quand elle dessine, le dessin a sa musique, unique qui suit, accompagne le travail, sert d’appui à son avancée. Comme une chanson de la peinture sur le papier, la musique de leur rencontre, de leur entente. Dans l’écriture aussi, le stylo ou les touches de l’ordinateur accompagnent l’inspiration. Le rythme que les doigts prennent sur le clavier, la précipitation, l’hésitation, les retours en arrière, les repentirs, c’est cette musique-là qui m’accompagne aussi. C’est aussi la mise en page, la typographie qui sont extrêmement importantes pour moi.
L’eau dans mon travail est très importante pour moi dans les thèmes qui m’inspirent, ce sentiment que tout naît de l’eau, comme dans le travail de FP
Le dessin émerge de l’eau, dit-elle. le texte, lui aussi, émerge de nulle part, comme l’enfant émerge mais concrètement, il sort de l’eau dans laquelle il était avant sa naissance.
A ce moment-là, la mère perd les eaux et l’enfant rencontre son destin. Le dessin, lui aussi, à partir de l’eau, prend forme et se transforme en dessin.
A propos de la vidéo du Mans
La petite fille s’arrête de jouer comme un film qui casse dans le projecteur flambant neuf de ses parents. Il y a une lumière et un bruit de film qui se déchire. Sa corde à sauter est devant elle à ses pieds, inutile, elle ne sait plus à quoi elle lui servait. Elle devient une corde, peut-être celle pour se pendre, en tout cas, le jeu s’arrête et on peut imaginer une tragédie.
Ça ressemble à un moment d’absence durant lequel on ne sait pas dire ce qui se passe. Rien, un interrupteur qui éteint l’écran, des images d’ailleurs enfouies au fond de soi et qui doivent le rester ?
Nane Beauregard
A partir du travail de Françoise, du mien, de l’idée que je me fais des liens qui existent entre eux et de l’intime dans tout ça.
◆DJ-SET DE SUZY Q
Ambiance festive / Play list exclusivement féminine empruntée à la soul, au rock en passant par le rap
◆SPECTACLE L’ARAIGNÉE ET CONVERSATION « THÉÂTRE ET PSYCHANALYSE » en partenariat avec l'ACF-VLB Association de la Cause Freudienne-Val de Loire Bretagne
MERCI à vous d'être venu·es si nombreux·ses à cette journée spéciale que nous avons pris tant de plaisir à préparer !
Merci aux partenaires qui ont construit cette journée avec nous :
FEMMES D'HISTOIRE
COLLAGES FÉMINISTES LE MANS
CFU
LE COLLECTIF GANGREINES
LA MISSION LOCALE
LE MOUVEMENT DU NID
NOUS TOUTES
LE PLANNING FAMILIAL
LE CIDFF SARTHE
SOLIDARITÉ FEMMES 72
TOUTES CAPABLES
LE COLLECTIF TOUT SEXPLIQUE
LA LIBRAIRIE THUARD
ASSOCIATION DE LA CAUSE FREUDIENNE
RADIO ALPA...