L’œuf ou la poule ?

Et si un soir, en vous passant machinalement les doigts dans les cheveux, vous découvriez, en bas de votre nuque, un fin museau qui pointe ? Ou bien si un matin, dans la glace, vous aperceviez, juste au-dessus de votre crâne, une paire de longues oreilles soyeuses ? Ou bien si après votre déjeuner, en vous brossant les dents, vous constatiez que vos lèvres, devenues minces et noires, s’entrouvrent désormais sur des crocs extraordinairement pointus ?

Cette métamorphose à la fois poétique et assez flippante de notre corps, cette coexistence de l’humain et de l’animal au sein d’une même anatomie, voilà ce qui inspire depuis toujours la plasticienne Françoise Pétrovitch. Et comme les répétitions à plusieurs sur une scène de théâtre sont beaucoup  plus marrantes que les séances de travail solitaire dans un atelier, Françoise Pétrovitch s’est plu à imaginer, en compagnie d’un vidéaste et d’un danseur, un spectacle « hybride » autour de cette hybridation qui la passionne tant...

À quoi assisterez-vous donc ? À un très envoûtant dialogue entre un corps qui marche ou qui s’immobilise, qui se tend ou qui se relâche, qui s’allonge ou qui se dresse debout, et une infinité de dessins projetés sur des voiles de tissus agités par la brise représentant des personnages, des halos d’encre, des ciels d’orage ou des visages d’enfants. Est-ce la projection des images qui rythmera la danse ou la danse qui déterminera le rythme des images ? Impossible à dire, car l’énergie secrète qui circulera sur le plateau sera celle d’un monde indéfinissable, d’un monde d’avant l’embryogenèse - où chaque cellule serait capable d’engendrer une multitude d’organismes différents...