ET SI TU DANSES...
DANSE
MARIETTE NAVARRO, MARION LÉVY
29 novembre - 19h
Le conte à rebours
Un homme déboule avec de grosses chaussures de randonnée aux pieds, le dos courbé sous le poids d’un sac rempli de cailloux. Des cailloux ? Oui, qu’il moissonne sur le bord des chemins et qu’il conserve scrupuleusement dans sa musette, au cas où il en aurait besoin. Parce que cet homme n’est
autre que Poucet, ex-Petit devenu adulte, et qu’il se souvient parfaitement que, sans l’aide de ces fragments de roche, il ne serait plus là aujourd’hui...
Il se souvient de cela et puis de tout le reste aussi. Alors, comme il n’a rien d’autre à foutre, le voilà qui s’installe et qui se met à déballer son histoire - à
raconter, par exemple, le moment où il a découvert son corps ou le bonheur que lui procurent les plongeons dans l’imaginaire. Et puis, tout en jactant, il
se mettra à bouger, à tournoyer, à virevolter comme une feuille caressée par un vent invisible, retrouvant ainsi, outre les récits, la légèreté de l’enfance...
C’est donc dans un espace sans lumière ni décor que le danseur Stanislas Siwiorek, avec les mots choisis par Mariette Navarro et les gestes imaginés par Marion Lévy, embarquera vos tout-petits dans l’univers magique de la danse - quitte à leur demander de temps en temps un hochement de tête, un mouvement de bras ou un haussement d’épaules pour l’intégrer ensuite à sa chorégraphie et en se fourvoyant aussi parfois (on ne se refait pas) dans
la forêt de frimousses qu’ils composent. Avec sa fraîcheur, sa sensibilité et ses multiples interactions, Et si tu danses ravira vos chérubins - ce qui n’est
certainement pas une raison pour les abandonner à l’issue du spectacle en vous comportant comme les parents indignes de son pauvre protagoniste...
Une belle échappée, librement inspirée du Petit Poucet, qui incite chacun à trouver son chemin.
Il arrive avec de grosses chaussures de marche au pied, le dos ployé, tout chargé d’un lourd sac à dos. Poucet est maintenant adulte, il ramasse des pierres, « pour quand il en aura besoin »,
« pour le ramener au sol », et à chaque caillou qu’il trouve c’est comme s’il refaisait le chemin vers l’enfance.
Arrivé au centre de l’espace scénique, le personnage découvre soudain que c’est là que tout a commencé. Alors les souvenirs le saisissent : « c’était toujours la même histoire avec moi : toujours je me perdais, toujours je me retrouvais. Un coup de vent : perdu. Un deuxième coup de vent : retrouvé.»
Au fil de la poésie de l’autrice Mariette Navarro — qui joue avec le conte et avec nos souvenirs comme avec les injonctions des adultes aux enfants, les débusquant en peu de mots comme on lève un lièvre —, le danseur Stanislas Siwiorek se met en mouvement, se redresse, tournoie, virevolte, devient feuille caressée par un souffle invisible. Il retrouve sa légèreté d’enfant et raconte ce temps de la découverte du corps et le bonheur que c’est de se plonger tout à fait dans l’imaginaire.
Forte de ces deux complicités, la chorégraphe Marion Lévy, a créé Et si tu danses dans le cadre d’Odyssées en Yvelines, comme une petite forme à installer partout, sans lumière, ni décor. Juste le geste, les mots et un petit parterre d’enfants.
Le spectacle tire sa beauté de son dépouillement et de cette façon très directe qu’a le danseur d’embarquer les tout-petits spectateurs dans l’« ici et maintenant » de la danse, de partager l’histoire avec eux comme une manière de jeu.
Présence magnifique, Stanislas Siwiorek est comme chez lui dans la gestuelle de Marion Lévy. « Vous êtes une jolie forêt de visages, leur dit-il. C’est plus joli avec vous, ici. Je suis content que tu sois là, petite forêt d’enfants. Tu es comme une forêt d’arbres, en mieux ». Et grâce à cette petite forêt d’enfants, à qui il demande un geste, puis un autre, il avance dans son histoire et nous invite à retrouver la nôtre.
Un dialogue joyeux s’invente dans l’instant entre la scène et la salle. Quelque chose de frais circule qui allège et réjouit.
Maïa Bouteillet | Paris Mômes
TTT Un personnage avance lentement, courbé pour ne pas faire tomber les cailloux qu'il ramasse et qu'il porte sur son dos, ses pieds, ses mains. Ce "ramasseur de pierre" s'appelle Poucet et raconte ses souvenirs d'enfance. Pas d'abandon ici, contrairement au conte de Perrault, dont le spectacle s'inspire, mais un besoin d'explorer de la part de l'enfant, quitte à se laisser porter par le vent, à se perdre, dans une forêt d'arbres ou de jambes. Il cherche son chemin et le retrouve toujours, grâce à ses cailloux.
D'une poésie simple, le beau texte de Mariette Navarro joue avec une adresse directe au public, tout comme la chorégraphie de Marion Lévy, qui intègre le spectateur dans la création (danse des cicatrices ou du vent, avec répertoire de mouvements demandés aux enfants).
Un spectacle d'une sensibilité fine et émouvante, servi par un comédien-danseur à la présence toujours juste.
Sortir Télérama
3 QUESTIONS DU THÉÂTRE DE SARTROUVILLE À MARION LÉVY
Propos recueillis en février 2021
Qu’est-ce qui motive ton envie de créer pour la jeunesse, en direction de cette tranche d’âge en particulier ?
Cela fait un moment que je crée pour la jeunesse. J’ai déjà fait trois pièces, mais elle étaient adressées à des enfants à partir de 6-7 ans. Il est vrai que la tranche d’âge, 4-5 ans, qui m’est proposée dans le cadre du festival Odyssées en Yvelines représente un vrai défi pour moi. L’enjeu est de trouver un langage spécifique qui rencontre les enfants à l’endroit où ils en sont dans leur propre construction. C’est l’âge de la découverte du corps, de la parole, des histoires, de l’imaginaire. C’est un défi auquel j’ai hâte de m’atteler, en complicité avec Mariette Navarro, qui va écrire le texte du spectacle, ainsi que Joachim Olaya.
De quelle manière abordes-tu les spécificités et les contraintes du festival Odyssées : une petite forme pour un·e interprète, un espace restreint pour représenter les choses au plateau, une création itinérante ?
J’ai déjà eu la possibilité de jouer dans des conditions « tout-terrain » : dans des centres de vacances, des CCAS, sur des places de village... Avec Et si tu danses, à l’inverse, la contrainte est le point de départ. Elle va faire partie intégrante de la dramaturgie, et consti-
tuera un appui pour inventer notre histoire. La médiathèque dans laquelle se jouera par exemple le spectacle sera un partenaire précieux : on va créer avec ce lieu, pour ce lieu, et ça cela me plaît beaucoup. L’inventivité sera active en permanence, et au cœur de chaque
nouvelle représentation.
Que souhaites-tu transmettre ou partager avec les jeunes spectateurs à travers ce spectacle ?
Si déjà j’arrive à faire partager ce plaisir de l’invention, de la création, je serai contente ! Que se passe-t-il quand on est créateur/trice ? Que
se passe-t-il quand on est spectateur/trice ? Comment la circulation s’opère-t-elle entre l’artiste et le public ? Car un spectacle se fait à deux : les jeunes spectateurs vont avoir bien-sûr besoin de l’interprète pour voir l’histoire, mais l’interprète va également avoir besoin des
enfants pour dérouler son histoire. C’est cette circulation entre les artistes et le public qui m’intéresse et que je vais essayer de mettre en
œuvre avec Et si tu danses.
Conception et chorégraphie
Marion Lévy
Texte et dramaturgie
Mariette Navarro
Créé pour et avec la complicité de
Stanislas Siwiorek
Avec en alternance
Stanislas Siwiorek et Eric Martin
Costumes et accessoires
Hanna Sjödin
Création lumière
Véronique Marsy
Régie générale
Margaux Capelier, Julien Nicol et Julie Lesas en alternance
Administration
Frédéric Cauchetier
Diffusion
Soraya Karimi / Triptyque Production
Communication
Julie Mouton / Triptyque Production
ENV. 45MN
DÈS 4 ANS
MAR 28 NOV ◆ 10H & 14H30
JEU 30 NOV ◆ 10H & 14H30
représentation de 14h30 en langue française des signes en partenariat avec l’association Accès Culture
VISITE GUIDÉE DE L'EXPOSITION SCENERY
Gratuite
Sur réservation au 02 43 50 32 50 ou billetterie@quinconces-espal.com
Merc 29 nov à 18h