Est-il possible, de nos jours, de s’évanouir dans la nature sans laisser de traces si l’on a envie de se refaire une petite virginité, de quitter les écrans radar de la société pour se réapproprier une part de nous-mêmes, alors même que nous fournissons quotidiennement, plus ou moins à notre insu, une quantité astronomique de données nous concernant dès qu’on surfe sur Internet pour consulter la météo ou acheter un pauvre billet de train ?

C’est à cette troublante question que les dessins non moins troublants d’Alexios Tjoyas tâcheront de répondre. En effet : chacune de ses images figuratives, voire carrément narratives (puisqu’accompagnées d’un petit texte en forme de témoignage ou de dialogue) captera la rencontre avec un homme ou une femme qui vous expliquera les raisons pour lesquelles il ou elle a choisi d’emprunter la voie de l’effacement et de l’invisibilité...

C’est donc en déambulant dans l’espace reconfiguré de L’Espal, qui n’aura plus rien du traditionnel cube blanc servant traditionnellement de cadre aux traditionnelles expositions, que vous pourrez badiner avec ce peuple d’apprentis-fantômes. À la condition, toutefois, que vous condescendiez à pénétrer à l’intérieur de ces images et à vous laisser aiguiller par votre propre regard. Car ne comptez surtout pas sur Alexios Tjoyas pour vous expliquer tout ce que vous devez décrypter dans ses oeuvres : c’est vous qui devrez faire ce travail à partir de vos sensations intimes. Pourquoi ? Parce que l’artiste, comme les adeptes de l’auto-dissolution dont il brosse ici le portrait sensible, a préféré s’éclipser derrière sa propre production...